Sweety n'a rien d'attachant, il hurle, il bave, il grogne. Sweety n'a rien d'innocent, c'est un enfoiré envers les autres de son espèce. Sweety n'est qu'un emmerdeur, mais tout le monde s'en fout, car Sweety est un chien. Le chien de la famille, un chien que je n'affectionne pas particulièrement et c'est réciproque, sauf lorsque Sweety à besoin qu'on le sorte. Là, il sait me trouver. Je vous l'ai dit, Sweety est un emmerdeur...et pas des moindres.

Qu'il pleuve, vente, grêle, même sous la foudre. Sweety se moque éperdument de la météo. Que vous soyez malade, ou tout simplement fatigué, cela ne semble guère l'intéresser. Sweety est un prince, ou plutôt un roi. Et moi, ainsi que toute ma famille, sommes ces aimables serviteurs, ces bouffons. Sweety est un sale pervers de chien, mais personne n'osera lui dire un jour, car Sweety a une bonne tête. Tout le monde pardonne à Sweety, même lorsqu'il crotte devant la porte. Essayez un jour d'en faire autant et vous verrez, vous ne serrez certainement pas aussi bien traité que ce chien.

Ainsi je peste, tenant ce chien en laisse ( même si parfois, j'ai l'impression que ce soit l'inverse.) Il est tard, une heure peut-être. Le quartier est bien trop calme, mais cela à toujours été ainsi, du peu que je m'en souvienne en tout cas. Les seuls fois où le quartier semble se mouvementer, ceux sont les fois où le vieux Woody Glones ( Mon voisin d'en face ) à le palpitant qui s'emballe, suffisamment pour faire intervenir une ambulance. Même si tout le monde semble s'inquiéter du sors de ce pauvre vieillard, il va s'en dire que tout le monde attend le jour où Woody Glones repartira – non dans une ambulance – mais dans un corbillard. Woody Glones est tout aussi enfoiré que Sweety, à la seule différence que Woody Glones ne viendrait jamais frapper à ma porte de chambre pour le sortir en pleine nuit.

Je suis presque arrivé au bout de la rue et rien ne semble encore être sortie de Sweety. Je serais bien tenté de le traîner de force vers la maison, mais Sweety à prit cette vilaine habitude de me grogner. Sale chien. Une pourriture. Une chose est sûr, c'est que je ne pourrais pas le pleurer lorsqu'une voiture viendra le percuter. Ou peut-être que la nature allait s'en charger. A vrai dire, peu m'importe. Sweety mérite de faire chier son monde, un autre monde.

Ainsi je peste, tenant ce ch...il me semble anormale de ne rien avoir au bout de la laisse. Sweety n'y est plus. Sweety a disparus. Pourtant, il me semble ne rien avoir vu. Je le vois encore renifler ce pied de lampadaire. Même si je n'aime pas ce chien, je viens à ressentir une certaine angoisse. En réalité, j'imagine la tête de ma mère si jamais je ne ramenais pas son fils à la maison. Alors je regarde tout autour de moi, chuchote son nom, même si cela me paraît insuffisant. Sweety a déserté. Sweety commence sérieusement à me faire chier, même si je ne fais que le penser. Il est trois heure, alors que je n'ai fait que sortir à une heure. Deux heures ceux sont écoulées, déjà, ou bien ma montre est déréglée.

Qui se promenait en skateboard à trois heures du matin? Qui le faisait, qui plus est, dans un quartier résidentiel qui n’était pas le sien? La réponse est pourtant simple, si simple qu’il est écœurant que personne n’y ait pensé plus tôt. Car la réponse à ce genre de question apparemment sans solution cache toujours un blond!
C’était typique de l’irlandais. Et si à vingt-sept ans fait on aurait tendance à croire que sortir d’un bar et rentrer chez soi se faisait en voiture, n’oubliez pas, encore une fois, qu’il s’agit d’un blond et non des moindres, il s’agit de Sean!
Celui que vous ne voulez surtout pas voir derrière un volant… encore moins lorsqu’il faut conduire en sens contraire. Il a pourtant voyagé, vu de nombreux pays, en quoi était-ce si compliquer de conduire à l’inverse qu’il l’avait appris?
Ne demandez pas. Il y a de ces mystères qu’il est mieux de préserver autrement on en retirerait toute la magie!

Hors donc oui, à dos d’Hugo, son fidèle skateboard, il portait Garry, sa tendre guitare, sur le sien, prêt à affronter le retour à la maison! … Si ce n’était qu’il s’était trompé à un tournant et qu’il se retrouvait maintenant à l’opposé de sa destination. Comment avait-il pu voyager autant s’il était si nul à se diriger dans une ville où il habitait depuis bientôt deux ans? Pas besoin de lire une carte pour visiter villes et pays, il suffit d’avancer sur un chemin aux mille possibilités.

« Et à travers les embûches ils avancent!
Et à travers le feu de l’enfer ils… ne brûlent pas!
Victorieux, à bas les lépreux!
Shalalalalalaaaaah! »

… Et parmi tout ce qu’il est préférable ne pas questionner chez un blondie, il va sans dire que les chansons improvisées à trois heures du matin sur un skateboard appelé Hugo dans un quartier inconnu après huit bières et cinq shooters remporte la palme d’or toutes catégoriques confondues!

Fruit du hasard? Peut-être que oui, peut-être que non, mais il n’en reste pas moins qu’un coin de rue tourné plus tard, blondie boy fut une rencontre pour le moins… canine.
L’adorable chien assis au milieu du trottoir le regardait, sa tête penchée sur le côté et l’irlandais posa un pied à terre pour s’arrêter juste devant l’animal.

« Hey amigo! Qu’est-ce que tu fais là? T’es perdu? »

Un silence. Un regard échangé. Et blondie venait s’asseoir sur le rebord du trottoir, le chien venant se posant les fesses à côté de lui.

« Ouais, j’sais ce que tu ressens. Je crois que je suis pas sur la bonne rue non plus. »

Fouillant ses poches, blondie en sortit deux sucettes. Il déballa la première, verte, et la fourra dans sa bouche avant de faire pareil avec la seconde, rouge, et de la tendre devant le museau noir.

« T’as faim? »

Le chien renifla ce qui lui était offert, risquant une lichette avant de répéter l’opération et Sean sourit.

J'avais beau regarder le bout de cette laisse, rien ne pouvait expliquer la disparition 'miraculeuse' de cet abruti de chien. A moins qu'il soit suffisamment malin pour s'être détaché du petit mousqueton qui accrochait la boucle de son collier...Non, je ne pouvais pas me permettre de penser – ne serait-ce qu'un instant – ou même imaginer Sweety se détacher de cette laisse. Sweety est un chien, un idiot de chien que seul le hasard aurait pu libérer. Et encore.

Toujours est-il que je ne retournerais pas à la maison sans l'avoir retrouvé. Bien que je le haïsse, je sais à quel point son existence est importante aux yeux de ma famille. C'est simple, mes parents l'ont toujours considéré comme leur 'troisième fils' et mon petit-frère – lui – semble le voir comme une sorte d'ami fidèle...une sorte de Lassie en quelque sorte. Lorsqu'ils en parlent, Sweety semble prendre forme humaine à travers leur parole, presque il pourrait faire à manger et passer l'aspirateur. Sweety est malin, Sweety est un bon chien, Sweety mérite toutes l'attention du Monde. Peut-être pour ça que le courant ne passe pas entre nous, après tout, j'ai l'impression d'être le seul à le considérer comme un chien. Ni plus, ni moins. Et ça, peut-être que ça le ronge intérieurement le Sweety.

Suis-je en train ne m'imaginer en rivalité avec un chien ? Wao, je devrais me prendre un peu moins la tête par moment.

Alors que je commence seulement à trouver le courage de tourner le dos à Sweety, prêt à annoncer à l'ensemble de ma famille que le cabot s'est certainement fait kidnappé et recyclé en un formidable sac à main pour la Fashion Week, voilà que j'aperçois au loin deux silhouettes, toutes deux installées sur un trottoir. L'une d'elle me rappelant étrangement Shitty...euh, Sweety.

Quant à l'autre, je me demandais bien à qui elle appartenait. Un clochard peut-être. A cette heure-ci, pourquoi pas. Après tout, les poubelles du quartier font souvent fureur auprès des SDF des environs.
Je m'approche, interpellant le cabot dont les oreilles pointent directement à l'écho de ma voix. Il est vrai que je n'ai jamais su cacher mon mécontentement perpétuel envers ce chien.
Plus je m'approche et plus j'aperçois Sweety se replier sur lui-même, comme un pauvre chien battu. A croire qu'il m'était déjà arrivé d'en arriver aux mains avec lui. Pitoyable. Sweety n'est peut-être pas si idiot après tout, c'est un manipulateur. Que cherche t-il à faire en se cachant presque derrière cet inconnu envers qui je fais finalement face.

Je rêve, ou le chien tient une sucette dans sa gueule ? Je finis alors par faire le lien avec ce type qui - lui aussi - tient une sucette dans sa bouche. Je reste un moment sans savoir trop quoi penser de tout ça. Puis finalement, je me décide à reprendre ce qui m'appartient...hélas.

« Désolé si il vous a causé problème. » Je lui dit, sans vraiment m'attarder face à ce type. Je m'approche aussitôt de Sweety qui semble bien décidé à me faire chier jusqu'au bout. « Arrête Sweety... » Je lui lance en tentant de le retenir pour lui remettre sa laisse. Puis il finit par me glisser des mains pour se dandiner fièrement quelques mètres plus loin. Et cette bouille, façon de me dire; j'te fais passer pour un con, quand je veux et devant qui je veux !

« Pourriture... » Je ne peux m'empêcher de souffler.

Des jours -- ou des nuits, dépendant de votre souci pointilleux du détail --, Sean en avait connu des pires, des biens pires. Perdu à trois heures du matin dans un coin de ville résidentiel et labyrinthique, évidemment qu’il y avait pire! Si le commun des mortels avait été stressé, ou avait à tout le moins perdu patience et serait agacé et frustré de ne pas savoir où son chez-lui se trouvait, blondie, de son côté, était aussi zen qu’une étoile de mer se faisant dorer tranquillement au soleil!
Perdu? Il n’était pas perdu. Il était juste en route pour une incroyable aventure! Le genre qui ne se faisait pas attendre et dont il allait se faire une joie de raconter à Mamie Marlene – qui n’est pas sa mamie à lui, mais cette fois-ci nous feront fi du détail – plus tard.
Car pour que la vie soit intéressante, elle se devait d’être une aventure, elle se devait de rompre, de temps à autres, avec le quotidien qui avait parfois le don de devenir ennuyant.
Et si vous vous dites que blondie était probablement cinglé de trouver amusant le fait d’être perdu à trois heures du matin et de ne rencontrer âme qui vive sinon un chien… eh bien gardez vos commentaires pour vous! Vous êtes quoi, la police de l’amusement?! è.é

Car, cul sur le trottoir, blondie boy faisait connaissance avec un nouvel ami. Un ami un peu poilu, qui avait une haleine un peu ragoutante et qui n’était pas du genre très bavard, mais ça allait à l’irlandais qui n’avait besoin que d’une personne pour faire la conversation : lui-même!
Les meilleures amitiés se cimentant sur le partage, Sean n’avait pas mis longtemps à tendre la sucette de l’amitié à son nouveau compagnon à quatre pattes.

« Alors, t’as une copine? »

Devant le manque d’enthousiasme de la bête, l’incendiaire malgré lui eut une petite grimace compatissante.

« Ouais, moi non plus. Les filles, ça peut être d’un compliqué des fois! »

Jouant un rythme imaginaire en tapant sa sucette sur ses dents, le blond ne mit pas longtemps à avoir une nouvelle mélodie en tête. Il était sur le point de demander à son partenaire de trottoir s’il voulait entendre une petite chanson de son cru --- ce à quoi tout être sensé répondrait non, retenez bien ceci --- lorsque l’écho d’une voix masculine perça le silence englobant de la nuit.
Propriétaire de son nouvel ami, apparemment. Sweety hein? Dommage, Sean lui trouvait plutôt une tête de Bob! – et ici on suggère de ne pas chercher à savoir ni comment ni pourquoi, on vous rappelle que ce type a nommé sa guitare et son skateboard!

« Pas de problème, on était en train d’échanger nos adresses! »

Observant un peu le manège du chien pour se défiler à l’autorité de son maitre, témoin inévitable  de la scène en étant uniquement présent, Sean fit encore claquer un peu sa sucette sur ses dents avant d’éclairer la nuit de ses grandes connaissances.

« T’sais, les chiens c’est comme les gamins, ça réagi à l’autorité ferme et aux pots de vin! »

Et à en croire toute l’autorité qui peut respirer de ce type-là, on se doute bien que sa classe fonctionne plus aux pots de vin qu’à l’autorité!

Courir après ce chien n'était pas dans mes intentions, je savais qu'il y verrait une belle occasion pour me ridiculiser, car Sweety a beau être des plus goulu, il n'en perd pas autant son endurance et sa vivacité. Quelle tête à claque, comme celle d'un gamin pourrit gâté, vous savez ce genre de gamin qui vous tient tête, ce genre de gamin qui serait même prêt à vous cracher dessus pour vous pousser à bout de nerf. Je devrais plutôt me calmer, après tout, ce n'est pas avec ce genre de pensé que je vais réussir à me débarrasser de ce chien. Il est bien trop encré dans ma vie à présent pour que je parvienne à l'en déloger aussi facilement. Je dois alors me montrer patient. Chaque chose à une fin, n'est-ce pas ?

J'en ai presque oublié la présence de l'autre, l'inconnu, mais il ne tarde pas à me rappeler son existence en se pointant avec son conseil. Je lui accorde alors mon attention, l'observant longuement, ne sachant trop quoi faire de ces paroles. Me parle t-il sérieusement ? Ou essaye t-il juste de ce foutre de ma gueule en voulant me faire croire qu'il soit possible d'amadouer ce chien par un quelconque stratagème. Je retourne alors mon regard sur le chien qui semble m'encourager à le poursuivre, sa langue tirée, presque j'ai cette impression qu'il esquisse un sourire...narquois.

- Croyez-moi...ce chien est bien plus malin que ce qu'il semble être. Plus je l'observe et plus j'ai cette impression, parfois, que quelque chose l'habite. Une sorte de je ne sais quel démon canin.

Je crache mon venin, ne lâchant pas ce chien du regard. Et pourtant, il faudra bien que l'un de nous se décide à retourner à la maison. Lui semblait s'en foutre de retourner à la maison, il pensait juste à profiter du plein air. Sûr, c'était bien plus amusant de courir dans tout le quartier que de courir dans la petite parcelle de pelouse derrière la maison. Profite débile de chien, désormais tu devras compter sur quelqu'un d'autre pour te sortir en pleine nuit. Tu auras beau gratter à ma porte, tu auras beau couiner, j'en aurais rien à foutre. Tu finiras dans la cour arrière, dehors, qu'il pleuve, qu'il neige, qu'il gèle, même si un orage violent vient à gronder, tu finiras ta nuit dehors, sur ton petit carré de pelouse. Comme la plupart des chiens du quartier à vrai dire.

J'observe à nouveau cet inconnu. Finalement, il n'a rien d'un SDF, à moins qu'il le soit depuis récemment. Quoi qu'il en soit, je remarque sa guitare, son skate et cette sucette qu'il continu de claquer contre ces dents. A la longue, ça deviendrait presque agaçant, mais ne disons rien. Je ne voudrais pas passer pour l'insociable du coin après tout. Je suis juste nerveux, ça passera.

- Et vous êtes qui au juste pour échanger votre adresse avec un chien ? Je lui demande alors, essayant de paraître un peu plus "détendu", on dit que c'est toujours bien venu de s'intéresser à l'identité des autres. C'est un peu comme proposer du sucre lorsque quelqu'un vient prendre un café, ou encore une petite cuillère, peu importe. Et puis si il compte faire le pied de grue jusqu'à ce que le chien se décide à m'approcher...je pense que nous avons le temps – largement même – de nous présenter.

Justement, paraît-il que je ne m'ouvre pas assez envers les autres. Et bien, voilà qui pourrait faire fermer quelques bouches...bon d'accord. Je lui ai juste demandé son nom, j'ai pas demandé sa biographie non plus.

Un démon? C’était une théorie intéressante, surtout lorsqu’elle était proposée à l’oreille d’un homme qui savait pertinemment que l’existence des démons n’était pas qu’une quelconque fable à dormir debout. Toutefois, en regardant ce chien plus adorable que poilu, blondie avait comme un doute. Pourquoi un démon se cacherait-il dans ce chien? Il y avait plus noble – ou, dans ce cas-ci, plus démoniaque – comme stratagème que de posséder un chien. Recevoir des caresses et être bombardé d’affection chaque jour que dieu fait? Ah ouais, ça c’est de la domination machiavélique!
Détaillant l’animal sous toutes les coutures, Sean était réellement en train d’étudier la question. Pendant de longues secondes, près d’une minute, ses yeux verts ne lâchèrent pas le chien pour terminer le tout sur un haussement d’épaules débonnaire.

« Nhaaaa, ce chien est clean. »

Parce qu’il avait déjà vu des chiens qui ne l’étaient pas? … Non, en fait, nous ne voulons même pas savoir!
Refourrant sa sucette dans sa bouche, l’irlandais était formel, le chien n’était pas démoniaque et son sourire satisfait prouvait sa joie d’avoir pu régler une question épineuse ce soir. Peut-être était-ce la raison de sa présence dans ce quartier où il n’avait jamais mis les pieds --- rien à voir avec l’ivresse, bien sûr ---, car il n’arrivait jamais rien pour rien dans la vie. Autrement, il y aurait de quoi se demander pourquoi il pouvait mettre le feu à un immeuble rien qu’en éternuant.

« Moi? »

Lui oui. Qui était-il. Une question normalement facile, mais on peut concevoir qu’elle perdait peut-être un peu de son sens à trois heures du matin… ou au contraire, elle prenait tout son sens à ce moment-là… ça dépend des points de vue.

« Sean Keenan, taureau, élément de terre! »

Il rigola  à sa propre présentation. Il passait trop de temps avec Marlene! Et ce fameux élément de terre était un grand sujet de débat entre eux. Sean était beaucoup trop tout feu tout flamme pour un élément de terre, ce pourquoi il rejetait l’astrologie… l’infamie à ne surtout pas prononcer devant Mamie Marlene qui pouvait hyper-ventiler juste en apprenant que vous êtes non-croyant.

« J’aime bien les tostitos et les ananas… mais pas en même temps. »

Réfléchissant soudainement à ce mélange qui venait de percuter son cerveau, le blond grimaça, sucette entre les dents.

« Nha, définitivement pas en même temps! »

Un moment de pause étant nécessaire à cette nouvelle chose que Sean venait d’apprendre sur lui-même,  l’irlandais attendit encore plusieurs secondes avant de reporter une réelle attention à son interlocuteur.

« Et toi? »

Sean Keenan...taureau...élément de terre. Curieux personnage, de plus qu'il ne semblait pas prendre ces détails à la légère, sinon pourquoi les souligner ? Je continuais de l'observer, sans pour autant réagir immédiatement à ces paroles, à vrai dire, j'ignorais quelle réaction adopter. Je restais un bon moment perplexe, juste le temps pour qu'il fasse partager sa réflexion sur l'union des des ananas et des …

- Tostiquoi ? J'échappe devant l'étrangeté de ce nom dont j'ignore l'origine, ni même de la chose qui se cache derrière. En tout cas, je devine que cela doit avoir un rapport avec un aliment quelconque...sinon, pourquoi chercher à faire un lien avec les ananas. Et bon sang, à quoi mène cette conversation ? Même le chien semble se poser la même question. Et pendant ce temps, « Sean  » poursuit sa réflexion jusqu'à la conclure sur une grimace.

A retenir ; Les Tostitos – même si je ne sais pas ce que c'est – n'accompagnerons jamais les ananas. Peut-être que ça pourrait m'être utile un jour. Non ? Enfin bref !

- Alexander...Collins. Je lui répond. A côté de sa présentation la mienne à l'air des plus plate, comme si aucune énergie ne circulait là-dedans. On me reprochait souvent ce côté linéaire dans ma voix, mon père me disait que je donnais l'impression d'avoir un bobine avec des réponses pré-enregistré à l'intérieur. Sois un peu plus 'Punchy', me disait-il.
Punchy, je devais être punchy, sûrement comme ce type que j'ai devant moi. Il était punchy. Enfin, il en avait l'air. J'entends déjà la voix de mon père me dire ; Tu vois, lui, il est punchy. C'est horripilant. Frustrant peut-être. En fait, j'en sais rien. Et si tout simplement, je n'avais aucune envie d'être 'punchy' ?

- Vous faites quoi dans le coin ? Je lui demande d'une manière plutôt ferme, même un peu trop. Là c'est sûr, je ne suis loin de paraître des plus punchy. Le temps de me rendre compte que je n'avais usé de ma meilleur tonalité de voix, je me suis rapidement reprit de manière un peu plus calme. Désolé je voulais pas vous le demander...comme ça. Et puis même ça me regarde pas. Tout le monde fait ce qu'il veut...ouai...même en pleine nuit...

Faire ce qu'on veut. Seul la nuit peut le permettre. J'étais en train d'y réfléchir. Ça me paraissait logique. La nuit tout le monde dort, personne n'a l'idée de surveiller qui que ce soit. Alors, la nuit c'est carte blanche. Pourquoi je me creuse la tête à ça. Je chasse ces raisonnements inutiles d'un léger tremblement de la tête. Puis je me concentre à nouveau sur Sean Keenan...l'élément de terre.

- Vous disiez ?

« Tostitos! »

Il avait mal compris. Forcément, blondie avait du mal s’exprimer avec ses huit bières et son trois heures du matin… ou alors, ce pauvre jeune homme ne savait absolument pas ce qu’était les tostitos. Ce qui, pour la blonde des plaines irlandaises, était pas loin de l’infamie, voir même du crime contre l’humanité s’il devait réellement mettre un titre à ce que c’était.

« T’sais, les chips, avec la salsa, le fromage gratiné au four… l’orgasme gustatif quoi. »

Évidemment, dit comme ça!
Et l’évidence était bien là pour le sorcier qui avait la fâcheuse tendance à prendre pour acquis que ses connaissances, ses talents, ses goûts… étaient partagés par tout le monde.

« On s’en fera un de ces jours, t’vas adorer! »

Venait-il réellement d’inviter un parfait inconnu à manger des chips et de la salsa avec lui? Oui, complètement! En fait, depuis qu’ils avaient échangé une syllabe, le jeune homme n’était plus un étranger sur l’échelle Seanienne de l’amitié… Une échelle à revoir, nous le concédons, mais avant que blondie revoit ses critères d’analyses… oui bon, aussi bien dire qu’il ne le fera jamais, ce gars-là voit des amis dans les zéro à quatre-vingt-dix-neuf ans – et ce uniquement parce qu’il n’a jamais rencontré de centenaire autrement ceux-là aussi entreraient parmi ses amis, pour sûr!
Puis, voilà qu’amis ils l’étaient officiellement maintenant qu’ils étaient présentés! Bientôt ils mangeraient de la salsa ensemble et passeraient d’amis à bons amis, Sean l’imaginait déjà.

Sauf si on se fiait au ton utiliser pour lui demander ce qu’il foutait dans les parages – sans ajouter le à trois heures du matin, nous notons l’effort de politesse –, mais blondie ne s’arrêtait pas aux tons. C’était parfois à se demander s’il portait ne serait-ce qu’une attention à décrypter le langage non-verbal humain… et la réponse était sans doute non, hélas.

« Dans le coin? Je sais pas trop en fait. Faudrait que je sache dans quel coin je suis… »

Parce qu’en le sachant il aurait un but précis? Possiblement… ou pas du tout. Non, en fait, blondie a rarement un objectif précis, il se contente de suivre ses envies. Comme ce soir où il a préféré prendre une direction plutôt qu’une autre et où il s’est retrouvé dans cette rue inconnue, rencontrant un chien et son maître. Ça ne serait jamais arrivé autrement!
Et maintenant, il a un copain pour manger des tostitos!!

Ce qu’il disait?
Bonne question, faillit-il bien dire. Ce mec avait une mémoire de poisson rouge sur certains trucs.

« T’aimes la réglisse? »

… Inusité?
Ouais.
… Creepy comme un violeur d’enfants qui les appâte avec des bonbons?
Totalement!
Mais lorsqu’on connaissait Sean et son habitude de distribuer des sucreries tous les jours comme si c’était halloween, ça paraissait moins sorti de nulle part… … le connaître étant le détail qui changeait absolument toute la perception de sa question…

Un orgasme gustatif, rien que ça. Je devais bien admettre que ces « Tostitos » attisaient une certaine curiosité, mais delà à accepter son invitation ? Comme si nous nous connaissions suffisamment. C'était étrange de la part d'une personne que je venais juste de rencontrer, alors que mes « amis » ne découlaient pas d'autant de sympathie. Je n'ai donc rien dit, après tout, peut-être que ce n'était que des paroles en l'air. Il ne fallait peut-être pas en tenir compte.

- La réglisse ? Je connaissais, bien évidement, mais je ne saurais dire si j'appréciais ce truc. J'en ai certainement mangé une fois, mais impossible de me rappeler si j'aimais ça. Je sais pas trop...enfin peut-être. Cela pouvait paraître étrange de ne pas se souvenir avec exactitude de ces propres goûts, mais on m'avait prévenu de ce genre de « trouble », mon traitement n'était pas sans conséquence. Par contre...je suis sûr d'aimer le chocolat. J'ajoutais, d'un air songeur, ça je ne pouvais pas le nier. Le chocolat était ma drogue, une drogue douce, je pouvais m’empiffrer d'une vingtaine de ces barres chocolatés en l'espace d'une heure et demi. Je dévorais jusqu'à calmer ces étranges pulsions. Rien que d'y penser je sentais un flux de salive envahir ma bouche.

Sweety continu de nous regarder, à vrai dire, je suis parvenu à  l'oublier un cour instant. Ce n'est qu'au moment où j'ai tourné mon attention en sa direction que je me suis rappelé le pourquoi j'étais ici. A la vu de cette grosse boule de poil qui avait prit ses aises sur la pelouse.

- Je devrais peut-être rentrer...Je songe alors à voix basse, mais pas suffisamment pas assez basse pour être ignoré des deux oreilles de Sweety qui se redresse aussitôt sur ses quatre pattes. Sa queue se balançant énergiquement. Alors que je m'apprêtais à m'avancer pour lui mettre sa laisse, ma conscience m'arrête net. Cette approche serait voué à l'échec. Alors, je me tourne vers Sean. Vous pouvez...me le récupérer ? J'ai l'impression que vous aurez bien plus de chance que moi...on peut pas vraiment dire que le courant passe très bien entre moi et ce chien.

Je lui tend la laisse.

Depuis toujours, Sean possédait cette facilité déconcertante à être amical… très amical même avec tout le monde y compris les étrangers. Nous dirions même particulièrement avec les étrangers. Ces gens-là étaient les meilleures personnes à qui raconter tout, n’importe quoi, et même, voir tout spécialement, nos plus lourdes pensées ou secrets. Étrangers ils sont, ils ne connaissent ni votre famille, ni vos amis. Dans le pire des cas, ils penseront que vous êtes un étrange, un malade mental évadé de l’asile de fous le plus proche, mais est-ce réellement important? Après tout, ce n’est pas comme si vous connaissiez ces personnes!
Et amis ou pas, l’irlandais se conduisait d’égale façon avec tout le monde. Déroutant, il faut bien l’admettre, mais puisqu’il ne le réalisait pas tout à fait…

Ce fut à la réponse de son interlocuteur que Sean ouvrit la bouche en grand. Si sa vie avait été un cartoon sa langue aurait roulée sur le sol. Il ne savait pas s’il aimait la réglisse? Mais quelle personne pouvait ignorer ce qu’elle aimait ou ce qu’elle n’aimait pas des sucreries?! Oui bon, techniquement, blondie aurait eu la même tête si le jeune homme lui avait dit qu’il n’aimait pas la réglisse puisque toutes les sucreries se devaient d’être aimées du goût du blond, mais ceci est une autre histoire.
Si la déception envahissait Sean avec cette histoire de réglisse, son nouvel ami remonta néanmoins rapidement dans son estime à la mention du chocolat. Le chocolat! Le saint parmi tous les saints! Alors là, ce garçon était certain de s’être fait un ami, car il n’avait fallu au blond qu’un saut dans ses poches de sa veste pour en sortir un morceau de chocolat bien emballé. Il le tendit au garçon, sans un mot dire, une seule expression planant sur son visage jovial, l’air de dire « t’en veux? »

Et quand l’adolescent laisse entendre qu’il devrait renter? Blondie hausse seulement les épaules, presque indifférent.

« Ok! »

Puis lorsqu’il demande si Sean pouvait lui attraper son chien?

« Sûr! »

Levant ses fesses du trottoir, le blond attrapa la laisse, observant le chien avec une pointe de défi dansant dans ses yeux verts.

« À nous deux amigo! »

D’un geste brusque, il se planta sur ses pieds et l’animal réagit au quart de tour, se cabrant, prêt à jouer. Un rire échappa à l’irlandais qui après quelques secondes de suspense changea complètement d’attitude en tapant sur sa cuisse, invitant le chien à se rapprocher pour un câlin.
D’un tour de main expert, il lui caressa l’oreille d’un côté et rattacha la laisse de l’autre.
Que de triomphe pour l’Irlande ce soir chers amis!

Avait-il toute une confiserie dans ses poches ? Je regardais, sans pouvoir m'empêcher d'être amusé, la barre de chocolat qu'il venait d'extraire de sa poche de veste, tel un prestidigitateur. Au final, je l'ai saisi, remerciant ce 'Willy Wonka' d'une brève secousse de la tête.
Je gardais la barre dans ma main, regardant le chien et me disant alors qu'il ne serait pas une mauvaise idée de retourner à la maison. Mais, un problème persistait à cet objectif; Sweety est son incorrigible manque de docilité. N'ayant pas vraiment envie de faire un tour de pâter de maison supplémentaire pour un simple chien, je me suis donc permis de demander un coup de pouce à Sean. Et il accepta, sans rechigner.

- Il n'est vraiment pas facile à faire écou...ter. Quel sale clébard, enfin non, tant mieux qu'il ait écouté du premier coup. Mais quel sale clébard dans le sens où il me fait passer pour un menteur, un incompétent. Pourtant, j'ai bien cru un instant que Sean allait devoir s'en donner un peu plus pour y parvenir, mais non. Une minute, même pas, sans prendre la peine de lui courir après. Je reste bouche bée, en fait, je me sens complètement con. Je ravale donc mes mots, mais j'en pense pas moins. Sweety est un sale chien. Il préfère les inconnus aux personnes qu'il connaît, enfin, il préfère Sean à moi. Mais, ça me fait ni chaud, ni froid. En fait, je m'en moque des affinités de ce chien, j'ai pas besoin de lui pour vivre et faire ma vie. Il n'est qu'un petit détail. Ni plus, ni moins.

- Impressionnant. Je lui dit, en approchant ma main pour reprendre la laisse, lorsque Sweety s'agite soudainement. Jappant, sautant sur place, ce chien a vraiment un grain, et pas un petit. Si seulement je pouvais vous le laisser...ce serait avec plaisirs. Apparemment, il a l'air de vous apprécier.
Après tout, quel chien n'apprécierait pas un type capable de sortir des friandises à qui en veut. Enfin, peut-être que j'exagère un peu, mais Sweety me le faisait comprendre en allant se coller contre Sean. Malheureusement, Sweety allait bien devoir quitter les jambes de son 'nouvel ami', il avait des personnes qui l'aimaient encore à la maison, bien assez pour que je ne puisse pas me permette de le laisser au premier venu.
- Non, sérieusement, vous êtes un type sympa...pas seulement envers le chien bien sûr. Pour le peu que je vous connaisse.

Je reprend alors la laisse, tirant suffisamment dessus pour décoller le tas poil des pieds de Sean. J'y arrive enfin, bon c'est sûr, après que Sweety ait couiné une ou deux fois. Vas-y, fait moi passer pour un tyran. Alors que je pense être sur la bonne voie, voilà qu'il retourne vers Sean, lui collant ses deux pattes avant contre sa veste pour tenter de lui lécher le visage. Ce n'est pas un chien, mais une boule de nerf. Cette fois, je le choppe par le collier et le retire de toute mes forces, lorsque soudain je sens un bref tiraillement au niveau de la main. Sweety retourne à terre, avançant sur un bon mètre avant de déambuler maladroitement pour finalement s’effondrer. Je regarde l'intérieur de ma main portant les marques d'une brève morsure sous une légère couche de sang

- Sale chien... Je chuchote en recouvrant la main avec le bout de ma manche. C'est alors que je m'aperçois de l'inactivité soudaine de Sweety. Il reste-là, couché sur le flanc, immobile, à cet instant je crois encore à l'une de ses tactiques pour attirer la pitié.

Aussi facile qu’une addition ou une soustraction basique qu’on apprend en deuxième année! On pourrait parler d’injustice, certes. L’irlandais avait cette facilité avec les gens et les animaux qui était aisément enviable car, contrairement à ce que le blond pouvait imaginer, ce n’était pas tout le monde qui la partageait. En avoir conscience était loin d’être partie gagnée pour lui, ce dont nous ne lui tiendrons pas rigueur autrement nous pourrions en avoir pour longtemps!

« J’ai pas droit dans mon logement » dit-il avec une déception bien sentie.

Comme si un inconnu te filerait son chien juste comme ça, faut pas pousser non plus!
Sauf que Sean était du genre à tout prendre au pied de la lettre. Heureusement, donc, que son logement interdisait les animaux, ainsi aucun cœur ne serait brisé ce soir de voir une si merveilleuse idée n’être en réalité qu’une blague aussi mal interprétée – pour ne pas dire pas interprétée du tout.
Ce fut donc presque à contrecœur que Sean rendit la laisse au propriétaire du gentil toutou qui demeurait collé contre ses jambes.

Le reste se passa un peu trop rapidement pour que blondie ait réellement le temps de faire quelque chose. Une seconde, l’animal se trouvait nez à nez avec lui pour lui lécher le menton, une autre seconde et l’adolescent tirait dessus pour lui faire retrouver la terre ferme, la suivante le chien avait mordu son maitre et celle d’ensuite il était inerte sur le trottoir.
Clignant une fois, deux fois, trois des yeux, le faire lentement, rapidement, moyennement… rien n’y faisait. Le chien ne bougeait plus et le garçon saignait.

Sean, sois franc, t’as but combien de bières exactement?
Assurément pas assez pour halluciner un truc du genre!

« Hum, ça va mec? »

Pour une fois, blondie n’était pas certain de l’attitude à adopter, mais il avait suffisamment de jugeote pour constater que la situation avait un peu trop de sérieux – et était trop bizarre – pour se faire désamorcer d’un des petits commentaires loufoques dont il avait le secret.

Une morsure et un chien inerte, il était supposé faire quoi avec ça?
Les brûlures, ça, il connaissait par cœur! Pourquoi il ne s’agissait pas de brûlures hein?  

-Ouai, ça va...ce n'est rien.

Effectivement, cette morsure n'était rien. Rien comparé à l'état de Sweety. J'ai mis cependant bien du temps à m'en inquiéter, et accepter que peut-être il ne s'agissait pas là d'une comédie quelconque. M'approchant pour mieux voir, je remarquais cet étrange regard que ce chien portait sur son visage, ce genre de regard qui exprime l'incompréhension et la peur de l'animal. Même si je m'inquiétais, ce n'était pas pour la santé de cet animal, mais plutôt pour la réaction de ma famille. Leur pauvre bébé venait de nous faire un je ne sais quoi qui l'empêchait de bouger. Il n'avait pas l'air souffrir, il ne faisait que respirer avec lenteur, gonflante et dégonflant sa cage thoracique, par moment quelques tremblements au moment de ses pattes. Je ne faisais que l'observer, sans la moindre compassion, sans même vouloir en savoir trop sur le mal qui l'avait frappé.

Ça lui apprendra à me mordre, je pense comme la plus vicieux des personnes. Si je m'observais, je suis certains que mon comportement me dégoûterait. Mais je n'aimais pas ce chien. Tout du moins, c'était une idée à laquelle je croyais.

M'abaissant à lui, je viens passer ma main sur son museau qui n'était plus aussi humide et chaud, mais sec et froid. Son regard me fixait, comme si il voulait me supplier de l'aider, ou encore le réconforter. Ce regard me dérangeait, alors j'ai préféré me relevé.

- Il est en train de...Je commençais, mes paroles soudainement freiné par une sorte de sensation désagréable au travers ma gorge. Reste avec lui...je vais chercher de l'aide. Je lançais à Sean. Veille bien sur lui. J'ai ajouté avant de me précipiter à l'autre bout de la rue. Car finalement, je ne suis jamais revenu vers Sean, ni même Sweety. Je crois qu'on appel ça de la panique, mais je n'en suis pas très sûr. A vrai dire, j'ai préféré partir, car je n'aurais rien fait pour sauver ce chien...alors que ce type, il me semblait beaucoup plus approprié pour ce genre de situation.