Maitriser le feu. C’était un doux rêve. Un objectif qui occupait toute sa vie depuis près de dix ans déjà. C’était ce qui l’avait poussé à quitter son Irlande natale et sa famille pour devenir le globe-trotteur qu’il était. Au courant de ses voyages, il avait souvent oublié la raison de sa présence dans ces divers endroits ensorcelants, mais était-ce là quelque chose de surprenant lorsqu’on connaissait un tant soit peu  la bête blonde?
À la Nouvelle Orléans, il avait trouvé Marlene, cette femme qui était rapidement devenue sa grand-mère de cœur et qui lui donnait l’impression d’être près de sa famille à nouveau, qui l’aidait comme elle le pouvait à se centrer sur lui-même et trouver au fond de lui ce qui déclenchait ce feu à priori incontrôlable. Mais la méditation, c’était pas vraiment son truc!

Se concentrer plus de cinq minutes? Ne pas bouger. Ne pas parler. Ne pas fredonner! Rien qu’y penser, il avait envie de grouiller du pied, de se gratter derrière l’oreille ou d’éternuer. Comment Marlene faisait-elle pour ne pas perdre patience après près de deux années catastrophiques? C’était l’un des nombreux mystères de la vie. Mais toute la volonté du monde n’était pas suffisante à Marlene pour pousser blondie boy vers le réel progrès.  Il était aussi incapable qu’à l’origine de contrôler sa flamme.
Alors peut-être Symphonia allait être plus efficace pour aider l’irlandais dans sa quête de contrôle. Peut-être oui, car l’assurer était un bien trop grand mot pour oser le dire. Sean avait rencontré plus d’une personne, avait eu plus d’un mentor, mais la patience s’effritait aussi sûrement qu’un chip trop sec, parce que pour supporter longtemps le surfeur des plages irlandaises, il fallait plus que la patience habituelle.

À commencer par maintenant où le bonhomme était déjà en retard d’une bonne quarantaine de minutes... pour se rendre à son propre appartement! Pourquoi donc? Déjà parce que la ponctualité lui était aussi étrangère que la concentration et que son trajet incluait un magasin de musique. Les instruments de la vitrine avaient brillé dans ses yeux verts avides de cette chose qu’il aimait par-dessus tout. Puis les guitares lui avaient fait de l’œil, avaient susurré son prénom avec amour et il en avait été fait de lui. Il en avait essayé une, puis deux, puis trois. Que le temps passe vite en agréable compagnie!
Ce que blondie ne réalise pas, toutefois, c’est que le temps peut être bien long lorsqu’on attend après un retardataire!
Garry sa guitare au dos, Hugo fidèle trottinette sous les pieds, il finit tout de même par arriver, une rousse attendant sur son porche. S’excuser, mais pourquoi? Il aurait fallu tout d’abord que le blond ait conscience qu’il avait fait quelque chose de mal!

« Salut! Comment ça va? »

Oh il allait le savoir. Pas de doute qu’il allait le savoir!

Étrangement, je m'étais levée de bonne humeur en cette douce matinée ensoleillée. Je m'étais installée sur le rebord de la fenêtre de ma chambre, une tasse de thé à la main en regardant le ciel. Aucun nuage, juste le bleu du ciel et la lueur des rayons de soleil chaud sur ma peau. Je me montrais, étrangement, rêveuse en cette excellente matinée. D'ordinaire, je me serais montrée d'humeur plus d'exécrable, mais là je n'avais aucune raison d'être comme tel. Enfin, c'était jusqu'à ce que je pense à ce que j'avais prévu pour cette journée qui avait sans doute trop bien commencé. Une leçon avec mon jeune Padawan. Un élève bien trop rêveur qui avait tendance à faire ressortir le côté guimauve qui régnait en moi. Je détestais mon humanité depuis assez longtemps pour espérer qu'elle disparaisse enfin. Mon cœur glacé ne pouvait pas supporter encore une fois cette bataille dont le vainqueur serait une fois encore ma mauvaise humeur. Je tentais d'effacer toutes ses pensées de mon esprit mon reprendre la sérénité que je pouvais ressentir quelques minutes auparavant. Cependant, elle ne dura pas longtemps. Ce n'était tellement pas moi.

Je saluais rapidement mon animal de compagnie avant de terminer mon thé et rejoindre la grande salle de bain annexée à ma chambre. Me prélassant longuement dans sous une douche des plus chaudes, je pris tout le temps qu'il me fallait et plus encore. J'affectionnais particulièrement prendre mon temps. Une dizaine de minutes c'étaient écoulées avant que je me décide enfin à sortir de la douche pour me préparer une fois de plus à la journée qui m'attendait. Je me vêtis, simplement, d'un short en jean, d'un t-shirt avant d'enfiler mes bottines. Je m'attaquais par la suite à ma flamboyante crinière. Séchant et coiffant cette dernière avec attention. Ma tresse sur le côté faite, je continuais par un maquillage des plus discret et mis quelques accessoires.

Une fois prête, je sortis paisiblement de la salle de bain. Je jetais un rapide coup d'd’œil à la pendule qui se trouvait dans mon séjour. Le blondinet qui me servait d'élève ne devrait pas tarder à arriver. Je pris place sur le fauteuil qui se trouvait au milieu de la pièce. Le temps passa et je commençais peu à peu à perdre patiente. Comment osait-il être en retard à ce point? Je lui avais pourtant répété d'être à l'heure.

Attendant sous mon porche, j'avais une envie irrésistible de cramer tout ce qui me passait sous la main. Sean devait avoir une très bonne explication pour ce retard. De toute façon même si cela avait été le cas, je doutais, que rancunière comme j'étais, je lui pardonnerais aussi vite. Je lâchais un soupir lorsque je vis une petite tête blonde se profiler à l'horizon. Lorsqu'il me salua, je retenais une injure avant de me retenir de lui crier dessus assez fort pour que mes voisins m'entendent. « Bonjour ! » Commençais-je en retenant ma colère. « Non, ça ne va pas ! Tu es en retard, très en retard ! » Enchaînais-je tendis qu'une flamme se créait à mes côtés, puis une deuxième. « Je t'avais demandé d'être à l'heure, non? J'espère que tu as une bonne explication ! » Terminais-je sur un ton incroyablement calme avant de faire disparaître mes petites flammes.

D’abord, l’incompréhension. Voilà ce qui anima principalement les yeux du plus blond des blonds de Louisiane. En retard, soutenait la belle rousse avec une colère qu’il jugeait bien loin d’être proportionnelle au crime. Il n’était qu’en retard après tout, il n’avait rien volé, il n’avait tué personne et, pour changer de d’habitude, il n’avait mis le feu nulle part. On pouvait même considérer cette dernière observation comme étant un grand accomplissement qui ne méritait non pas de la colère, mais un tonnerre de félicitations!
Mais un retard? Et puis, il ne pouvait pas être si en retard que ça, si?
Oh que si! Mais dans le monde selon Sean Keenan, les retards faisaient partie de ces choses relativement peu importantes.

S’excuser aurait été un bon début. Du moins, n’importe qui aurait pensé à le faire le plus sincèrement possible quand il voyait des flammes se former de chaque côté de la femme rageuse. Ça lui donnait un petit quelque chose de… franchement intimidant!
Toutefois, ou malheureusement ça dépendait des points de vue, Sean n’était pas n’importe qui et encore moins tout le monde. Il faut dire que la peur du feu n’était pas de celles qui l’affectaient énormément. Brûlures, flammèches intempestives, brasiers, il avait eu son lot au fil des années et la terreur avait dû vite s’effacer autrement il serait mort brûlé vif depuis longtemps!
Non, plutôt que d’avoir peur, de s’excuser, ou même de se sentir un tant soit peu coupable, blondie écarquilla les yeux dans un mélange d’émerveillement et de fascination.

« Ouwaaaah, balaise! Tu fais comment?!! »

Si tu étais arrivé à l’heure, peut-être le saurais-tu maintenant!
… Nous en doutons fort, mais il y avait peut-être un fond de vérité là-dans, car ce n’était certes pas en se pointant près d’une heure en retard qu’on apprenait convenablement à gérer son côté… enflammé!

« Ah ouais en fait… »

Parce que tout d’un coup il admettait son retard? Il le réalisait, seulement? Où était passé l’irlandais qui s’en foutait?
Attention, nuance, il s’en foutait encore, juste que son petit côté bien sincère le poussait à répondre néanmoins.

« M’est arrivé un truc pas croyable! »

Sean, le suspense est inutile… et le terme incroyable exagéré. Tout le monde sait que ça t’arrive au moins trois fois par semaine pour tout et rien.

« Je suis amoureux! »

Mais pas d’une fille non! – encore heureux.  D’une guitare, une énième. Nous ne comptons pas ici les fois où ça pouvait lui arriver avec un autre instrument tel violon, piano, banjo, ukulélé… maracas =.= Et encore moins sans les sucreries, les gâteaux, les chocolats… bref… Sean est du type aimant et il aime TOUT!

« Je crois que j’irai l’acheter en rentrant. Je vais l’appeler Denise. »

… Et maintenant serait le parfait moment pour spécifier que tu parles d’une guitare…

La journée avait si bien commencer, mais elle s'était si rapidement assombrit que je me demandais si cela résultait de la bonne humeur que je dégageais en me levant. Le soleil était présent et apaisait ma colère. Et j'en avais grand besoin, car je devais faire face à mon Padawan. Celui qui faisait ressortir le peu d'humanité qu'il me restait et rien que pour cela je me devais de le haïr. Cependant, je trouvais son don des plus intéressant, ce qui n'avait rien d'étonnant étant donné la nature élémentaire de ce dernier. J'avais, pour une raison qui met totalement inconnue, décider de lui enseigner comment maîtriser ses flammes et hélas, il m'arrivait bien souvent de regretter ce choix. D'un, je détestais voir cette humanité resurgir et de deux, je détestais son aspect un peu trop rêveur pour mon tempérament enflammé. Pour résumer, ce blondinet avait le don de me mettre hors de moi et se peut importe la situation. D'ailleurs, il avait décidé de commencer dès le début en arrivant à son cours avec une dizaine de minute de retard.

Tentant de garder mon calme et de ne pas exploser avant le début du cours, je concentrais ma rage dans deux petites flammes qui apparurent à mes côtés tendis que le blond rêveur s'avançait dans mon allée pour s'arrêter juste devant moi. Il me saluait d'un air des plus désinvoltes comme s'il ne se doutait aucunement que je serais hors de moi après l'avoir attendu aussi longtemps. Un sourire complètement faux m'échappa avant que je ne lui demande la raison de cette absence.

Je repris peu à peu mon calme et fis disparaître tranquillement les petites flammes qui m'accompagnaient. « Honnêtement, je ne sais pas si tu mérites de connaître un tel secret. » Répondis-je un peu sèchement tendis que Sean me demandait comment je faisais pour faire apparaître et disparaître mon élément à ma guise. Je n'étais pas assez de bonne humeur pour montrer la moindre sympathie, aussi fausse soit-elle. Je voulais juste entendre la raison qui avait pu le pousser à être aussi en retard, même si je savais pertinemment qu'aucune de ses réponses ne pourraient me satisfaire. Il fallait être honnête, il m'avait mis de très mauvaise humeur et devrait sans doute le payer d'une façon ou d'une autre. Enfin, j'avais tout mon temps pour concocter une vengeance aussi puéril pourrait-elle être.

« Tu n'es pas sérieux ?! » Me contentais-je de souffler en restant sans voix à la raison qui m'exposa. Quoi?! Pourquoi l'avais-je choisis comme Padawan déjà? Honnêtement à ce moment précis, toutes raisons m'échappaient complètement.... Wouah, je sentais qu'il allait vraiment mettre ma patience à rude épreuve. Je lâchais un soupire. « Bon, laissons tomber. Commençons maintenant que tu es, enfin, là. » Lançais-je avant de rentrer dans ma grande et spacieuse demeure pour prendre la direction de la salle d'entraînement qui pouvait aussi me servir de salle de gymnastique. Pour ce faire, nous avions traversé le grand salon qui prenait place à l'entrée avant de traverser le couloir de l'aile est.

« Mais allé quoi! C’est pas comme si tu pouvais le filer à d’autres! »

Il marquait peut-être un point ici. Ce n’était pas tout le monde qui était capable de maitriser le feu ou simplement de jouer avec cet élément à défaut de savoir s’en servir correctement. Blondi savait au moins ça pour avoir parcouru divers pays dans l’unique but de trouver quelqu’un susceptible de lui apporter de l’aide.
Il en avait trouvé un peu en la personne de Marlene, la grand-mère de Charlie, mais un véritable mentor comme la rouquine, c’était une opportunité comme jamais il n’en avait croisées jusqu’ici.
Et il arrivait en retard?
Oui bon, personne n’est parfait, n’est-il pas?  

Il était complètement sérieux, malheureusement pour Symphonia qui ignorait la véritable nature de cet amour. Ce ne serait hélas pas avec Sean qu’elle le découvrirait de sitôt. Ce type avait la fâcheuse manie de traiter ses instruments comme des êtres humains, parler d’eux en tant qu’objet ne lui venait même pas à l’esprit. Pour les non-initiés, il était facile de s’y méprendre.

« Oh si. Elle a un de ces teints et des courbes, des courbes! Ah… à faire rêver. »

Il se perdit d’ailleurs dans le méandre de ses souvenirs, l’œil étincelant de bonheur, l’expression béate, un sourire conquit trainant sur ses lèvres. Cet homme était amoureux, ça ne faisait aucun doute, mais d’une guitare, franchement? Ça allait être joli lorsque le mot qui vendrait toute la mèche serait prononcé. Symphonia allait en perdre pied de surprise et/ou de désespoir.

« Ok! »

Motivé malgré l’absence flagrante de concentration, Sean frappa ses mains l’une dans l’autre avant de se les frotter d’anticipation. Il suivit la belle rousse dans son antre, prenant le temps de s’enchanter sur le décor somptueux qui s’offrait à ses yeux éternellement émerveillés devant la vie sous tous ses aspects. Ce n’était pas la première fois qu’il venait ici, mais il ne se laissait jamais d’observer, aussi sûrement qu’il ne saurait se lasser de chantonner ou gratter des mélodies sur son fidèle compagnon à six cordes.

« On va faire quoi? »

Se concentrer plus de trois secondes sera déjà un exploit… alors qu’avait prévu Symphonia pour tenter de vaincre le lamentable manque de contrôle de son jeune apprenti?

Une chose était certaine, personne ne pouvait autant m'agacer que ce blondinet. Il avait le don de m'énerver pour un rien ou alors de faire resurgir en moi des sentiments bien trop humains. Dans les deux cas, je ne pouvais être qu'amener à lui en vouloir, d'où ce qui pouvait ressembler à ses yeux à de multiples sautes d'humeur. Je pouvais me montrer à la limite de l'humaine par moment et c'était ce que je détestais le plus dans ma vie. Hélas, Sean avait bel et bien raison, l'art que pouvait représenter mon élément n'était pas quelque chose que je pouvais apprendre à n'importe qui. Peu de personnes étaient liés à cet élément et ce davantage depuis la quasi-extinction de ma race. Les phénix, une espèce autrefois si majestueuse... Les miens me manquaient parfois, il était vraiment les seuls qui pouvaient faire naître en moi un sentiment qui ne me donnait pas envie de flamber tout ce qui m'entourait.

Je mis tout cela de côté et me contentais de me concentrer de nouveau sur mon élève aussi insupportable pouvait-il être à mes yeux. Ce dernier m'exposait enfin la raison de son retard. Fidèle à lui-même, Sean se montrait des plus enfantins à mes yeux et je restais figée à son explication. Lui, amoureux et d'une guitare en plus. Ma réaction face à ses paroles fut claire et précise. Nous n'avions vraiment pas la même façon de voir le monde. J'avais l'impression que tout était merveilleux dans le sien et je détestais le sentiment guimauve que cela provoquait parfois en mon être. La bonne humeur et les sentiments aussi humains soient-ils n'étaient pas vraiment ma tasse de thé. J'avais d'ailleurs tendance à les fuir comme la peste. « D'accord... » Me contentais-je de murmurer avant de pousser un long soupire désespéré.

Je laissais tomber, désespérée à l'idée de comprendre mon jeune Padawan un jour. Je doutais fortement que ce soit le cas un jour et honnêtement, je faisais de mon mieux pour supprimer toute humanité donc ce n'était pas la meilleure idée. Je rentrais tranquillement dans ma grande demeure traversais l'entrée, le grand salon et le couloir de l'aile est de mon manoir avant d'enfin arriver dans ma salle de gymnastique. Je pouvais un léger soupire et pris place au centre de la pièce avant de jeter un coup d'oeil derrière moi pour vérifier que mon élève me suive. J'attendis un instant que le blond soit non-loin de moi pour commencer mon cours. Un léger sourire se dessinait sur mon visage. « On va commencer par quelque chose de simple... » Commençais-je avant de créer une petite flamme à mes côtés. « Laisse-moi voir combien de temps tu peux laisser l'une de tes flammes allumer... » Terminais-je en espérant qu'il n'ait pas besoin de bougies pour cet excercice...

La rouquine qui lui servait de mentor n’était pas la personne la plus resplendissante de bonne humeur qu’il eut connue. On pourrait dire que lui-même étant champion toutes catégories en la matière, ça pouvait être difficile de trouver un égal, mais blondie n’était pas difficile. Ses standards étaient peu élevés. Si peu, en réalité, que là où n’importe qui n’aurait jamais accepté une seconde leçon parce que Symphonia donnait l’impression désagréable que tout était une corvée, Sean, lui, se plaisait à revenir fois après fois.
On pourrait simplement dire qu’il était trop stupide pour voir que la rousse se retenait de l’étrangler, mais ce serait une erreur. L’irlandais n’était pas un idiot congénital, il avait seulement fait le choix de demeurer candide et, qui sait, peut-être même arriver à percer la carapace de la maitresse du feu. C’était une sorte de petit défi personnel. Non pas qu’il s’attendait à un résultat, mais sait-on jamais, il savait mieux que bien d’autres que la vie était remplie de surprises!

Bref, son éloge à sa future guitare faite et bien faite, le bonhomme suivit son mentor jusqu’à la salle dite d’entrainement. Pour faire de la gym c’était bien, mais Sean doutait un peu que le mobilier soit résistant au feu. Une motivation supplémentaire pour se concentrer et ne rien faire cramer? Peut-être, oui, mais la concentration et Sean… nous ne dirons jamais assez combien ces deux entités n’avaient rien à faire ensemble!

« C’est pas de l’allumer le problème, c’est surtout de l’éteindre. »

Car si Sean savait mieux que personne faire des étincelles rien qu’en éternuant, le plus difficile était avant tout d’éteindre ces flammes avant qu’elles ne ravages tout. Et, plus souvent qu’autrement, la panique ne faisait qu’amplifier le brasier et un véritable buché digne du diable en personne ravageait tout.
Dur de croire que cette puissance dévastatrice se cachait dans un être aussi pacifique que le blond, pas vrai? Et pourtant…

Claquant des doigts comme pour imiter un briquet, le musicien dut s’y reprendre à quelques fois avant d’arriver à faire naitre une flamme. Heureux d’avoir réussi – car même ça, ça ne se produisait jamais quand il le voulait –, un large sourire se dressa sur le visage de Sean comme si c’était le matin de noël.

« Oh ouais, cool! »

C’était même un record personnel. Normalement, son feu n’en faisait qu’à sa tête, il apparaissait quand il ne le voulait pas et demeurait éteint lorsqu’il le voulait. Une bataille de chaque instant, mais ce coup-ci, il avait réussi. Qui sait, peut-être qu’aujourd’hui était un bon jour pour une leçon enflammée!
Toutefois, excité comme une puce d’avoir réussi Sean perdit rapidement le contrôle et sa flamme prit de l’ampleur, doublant sans que le blond en ait ressenti la volonté.

« Wooooh! »

Et la surprise engendra une panique qui fit tripler la flamme de volume.
D’habitude, c’était comme ça que ses brasiers du feu de l’enfer commençaient…

Mon élève enfin présent et la discussion sur son retard terminée, nous pouvions passer aux choses sérieuses et débuter le cours tant attendus. De mauvaise humeur et chiante au plus haut point, je guidais mon jeune padawan à travers ma somptueuse demeure. Je traversais l'entrée qui était rangée en grand salon où trônait en son centre un mobilier en chêne et en cuir. Autant dire que ce n'était pas vraiment des meubles adaptés à ma condition d'être de feu. Cependant, j'étais ainsi, j'adorais vivre dans le luxe, je ne pouvais pas m'en empêcher et puis, si je vivais encore un siècle, autant que cela soit dans un manoir avec un minimum de confort. Je continuais ensuite vers le hall est, prenant un couloir et entrais en silence dans ma salle de gymnastique qui faisait souvent office de salle d'entraînement lorsque j'avais une envie incroyable de flamber tout ce qui bougeait. La salle était relativement spacieuse avec des tatamis et divers autres instruments de gymnastique qu'il m'arrivait parfois d'utiliser lorsque j'étais de meilleure humeur.

Me plaçant au centre de la pièce, je me retournais pour faire face à mon unique élève pour commencer le cours. Je lui lançais mes directives dans le but de commencer par quelque chose d'assez simple tendis qu'une flamme apparu à mes côtés comme pour accompagner mes paroles. Ma consigne ne semblait pas emballer plus que cela le jeune blondinet qui insinuait qu'allumer une flamme était bien plus facile que de l'éteindre. En un sens il n'avait pas tort, même si dans mon cas je ne ressentais plus cette difficulté depuis fort longtemps déjà. Je me contentais ainsi d'acquiescer sa réflexion d'un signe de la tête avant de l'insister à commencer ce qu'il fit assez rapidement à mon plus grand bonheur. Je le fixais, silencieuse lorsqu'il fit sa petite imitation que Johnny dans le film des quatre fantastiques et ce jusqu'à ce qu'il allume enfin sa flamme. Je retenais un sourire une fois ma pensée achevée. Et voilà que je me mettais à citer des films, je me trouvais désespérante parfois.

« Bien. » Me contentais-je de prononcer une fois la flamme allumer. Hélas, j'avais parlé bien trop vite et la source de chaleur prit rapidement de l'ampleur tendis que la panique de mon élève grandissait. Je soupirais un instant et je préparais à éteindre sa flamme si cette dernière devenait trop puissante avant de prendre la parole. « Calme toi. Ne panique pas et respire profondément. » Conseillais-je sur un ton presque maternel ce qui me surpris au plus haut point. Enfin, je n'avais aucune envie qu'il flambe la moitié de mon manoir, cela expliquait peut-être cette intonation trop gentille pour me ressembler. « Tu peux toujours fredonner si cela t'aide à t'apaiser. » Lançais-je finalement. Après tout, c'était peut-être un moyen pour Sean de mieux se contrôler, lui et sa passion pour la musique. Cela dit, rien n'était sûr. Si la flamme gonflait encore je serais obligée de la réduire ou de l'éteindre moi-même.

C’était principalement toujours de la même manière que ça se produisait. Une petite flamme, minuscule, rikiki, qu’on pourrait croire inoffensive. Il suffirait d’un souffle, d’une pincée de doigts humides et pop! Plus de vilain feu. Oui, ça commençait toujours de cette façon-là, mais jamais ça n’en restait à cette petite étincelle toute jolie et hypnotique.
Mais le feu était un terrible adversaire qui ne s’arrêtait jamais aux petites choses. Il voyait grand le feu, toujours plus grand. Un gourmand, pour sûr, affamé sans jamais connaitre la satiété.
Lui qui aurait dû être l’ami de Sean, son allié de chaque instant, sa grande force, il était plutôt son pire ennemi, transformant l’irlandais en une arme dévastatrice qui échappait constamment à son propre contrôle.
Ça n’avait rien de joyeux, il va sans dire, mais pour l’instant, sans un mort à son actif, on pouvait tout de même affirmer que le blond manœuvrait plutôt bien sa situation. Ou pas trop mal, dépendant des points de vue.

Mais pour une fois, il avait réussi à prendre le contrôle. Il avait demandé du feu, il en avait eu. Pas tout de suite, évidemment, Rome ne s’est pas construire en un jour, mais il y arriva néanmoins, ses yeux scintillants de joie et de fierté à la lueur de cette flamme qui était de son cru.
Néanmoins, le contrôle de soi n’était pas ce en quoi blondie excellait le plus. Son ravissement gonfla non seulement sa poitrine, mais également son feu qui doubla, puis tripla. Joie envolée, voilà que ça ressemblait plus à Sean d’être victime de son feu plutôt que d’en devenir le maitre incontesté.

Sa bouche formant un petit O, concentré à respirer comme le lui suggérait Symphonia, Sean avait tout de même l’estomac trop tordu pour arriver à réellement se détendre. Il voyait déjà la maison réduite en cendres, ce n’était pas bon. Pas bon du tout! Il pouvait dire adieu à son mentor s’il carbonisait une si belle demeure.

« J’respire, j’fais que ça respirer! »

Ce n’était pas comme s’il pouvait fonctionner sans, mais le sarcasme n’avait pas forcément sa place ici, tandis que sa flamme avait quadruplée de volume depuis sa taille initiale.
Fredonner, ça, c’était une idée qui plaisait beaucoup au blond! Fixant son feu, à la fois déterminé et incertain, il se mit à chantonner tout bas ce qui semblait être… oui, pas d’erreur, c’était bien une chanson de Disney, la belle et la bête pour plus de précision.
À sa défense, nous dirons que tenir une classe de maternelle vous embrigade l’esprit à penser en premier à ce genre de titres candides et enfantins.

Et lentement, très lentement mais sûrement, la flamme commença à diminuer d’intensité. Ce n’était qu’une maigre victoire pour toutes ces fois où il avait perdu le contrôle, mais pour l’une des rares fois de sa vie, Sean avait pris le dessus. C’était un pas énorme dans le combat contre son côté plus ardant!

Le cours avait enfin débuté et ce malgré un retard assez important de mon élève. D'ailleurs, il avait été assez facile de deviner que ma mauvaise humeur était en partie dû à ce fameux retard. En même temps, on ne pouvait pas vraiment dire que la joie se lisait particulièrement souvent sur mon visage, bien au contraire. J'avais abandonné depuis bien longtemps ce concept de bonheur et de joie que je trouvais bien trop humain à mon goût. En sommes, je trouvais mon élève bien trop humain à mon goût et hélas, cela avait parfois tendance à déteindre sur moi. C'était bien entendu des élans quasiment indétectable d'humanité, mais ils étaient bien présents ce qui avait le don de décupler ma mauvaise humeur. Aujourd'hui n'allait donc pas déroger à la règle et c'était en tentant de contrôler au maximum la bataille perpétuelle qui faisait rage en moi que je tentais de faire mon cours.

Je débutais par un premier exercice qui m'avait semblé comme était assez simple, créer une flamme et la laisser stable le plus longtemps possible. Comme d'habitude, j'accompagnais ma consigne par un petit exemple et fis apparaitre en toute tranquillité une petite flamme à mes côtés. J'observais par la suite mon élève faire de même et ce avec le temps qui lui semblait nécessaire pour y parvenir. Ce fut avec une incroyable patience que j'attendis l'apparition de la flamme de mon jeune Padawan et esquissais un léger sourire une fois celle-ci enfin parmi nous. Je félicitais même mon élève et ce sans doute un peu trop vite, car rapidement le blondinet perdit le contrôle de sa création.

Je lâchais un léger soupire, désespérée. Cela dit, je ne pouvais pas lui en vouloir, le feu était un élément complexe qui demandait beaucoup d'exercice avant d'arriver à la contrôler comme on le souhaitait. Je pratiquais ses exercices depuis presque d'un siècle, alors il était certain que nous n'avions pas le même niveau. Je me préparais à éteindre la flamme qui prenait de plus en plus d'ampleur et commençais par lui donner de petits conseils. D'ailleurs, je n'avais pas du tout apprécie mon propre ton lorsque je prononçais ces paroles. J'avais eu l'impression d'être protectrice envers mon élève, un geste que je détestais pour être bien trop humain. Je tentais de mettre ce sentiment de côté en me concentrant davantage sur la flamme qui pourrait très bien flamber mon mobilier en un rien de temps.

Un nouveau soupire m'échappa lorsqu'en fin la flamme diminua peu à peu de volume. J'étais étrangement fière de mon élève, il avait réussi à contrôler sa flamme pour lui faire reprendre une taille respectable pour notre petite leçon. Cela dit, j'aurais largement préféré qu'il choisisse un autre registre de chansons pour apaiser sa création. Je me surprenais moi-même de reconnaître la provenance de la musique qu'il chantait tout bas. « Tu vois, tu as trouvé un moyen de stabiliser ta flamme. » Déclarais-je en esquissais un faible sourire à mon Padawan. Un moyen de le réconforter en quelque sorte.

« Bien continuons. » Lançais-je finalement tendis que le faible sourire sur mon visage s'effaçait rapidement. Une minute, c'était bien trop long comme sourire pour moi, trop humain... « Essaye de la laisser ainsi pendant cinq ou dix minutes, après on improvisera. » Continuais-je en m'installant tranquillement sur une poutre qui se trouvait non loin de moi, me laissant accompagner par ma flamme.

Cinq ou dix minutes?!!

« Mais je suis supposé faire quoi pendant dix minutes? »

Ne pas mettre le feu partout, principalement. Mais dix minutes pour le blond des côtes irlandaises, c’était très long s’il devait les passer à se tenir là rien qu’à contrôler une flamme qui n’en faisait, en réalité, qu’à sa tête.
Néanmoins, l’illumination ne tarda pas à pointer le bout de son nez. Dix minutes. Il avait dix minutes et il venait de relativement prendre le contrôle de son don à marmonner une chanson de la belle et la bête.

« Oh, je sais! »

Et nous savons maintenant que le bonhomme avait parfois tendance à se répondre tout seul. Non pas que cela nous étonne vraiment, se parler à lui-même était monnaie courante, mais cette fois-ci Symphonia en faisait les frais et découvrait de ce fait une petite pierre de plus dans le mur de la personnalité qui faisait de Sean… Sean.

Son fidèle Garry toujours pendant dans son dos, ce fut d’un mouvement expert que l’incendiaire ramena sa guitare tant aimée devant lui. Sa flamme n’était pas morte. De son empressement à vouloir gratter les cordes de son instrument, elle s’était intensifiée quelque peu, toutefois rien de catastrophique ne s’était enclenché. Ce que l’on peut considérer comme une énorme amélioration!
Les doigts du musicien filèrent sur les cordes, donnant naissance à une mélodie que seul le blond connaissait. Avec ravissement il observa son feu tanguer au rythme et cela lui donna un tendre sourire.
Toutes ces années, tous ces pays, toutes ces rencontres et ces tentatives et tout ça pour quoi? Pour que la réponse soit là depuis le début. La musique qui le transcendait était le secret du contrôle de sa flamme, rien de moins. C’était stupéfiant.

Passant d’un rythme lent à un peu plus rapide, la tendre mélodie se transforma en un ton qui donnait envie de taper du pied et son feu y réagit de la même façon, donnant l’impression de danser sur la musique.
Puis, il laissa de côté l’improvisation pour s’amuser à reprendre Travel in time de Marching Band, la première chanson qui lui était passé par la tête.
Tout du long, sa flamme s’était adoucie ou intensifiée selon le rythme que prenait la mélodie et continuait de flotter dans l’air en dansant à moins d’un mètre du sorcier.
C’était magique. Purement et simplement. Il n’y avait pas d’autres mots pour le décrire. Pour la première fois, Sean avait réellement une incidence sur son don. ce n’était rien et on était encore loin de ces scènes d’actions où les détenteurs d’un tel don balancent des boules de feu à leurs adversaires, mais pour blondie il s’agissait tout de même d’une grande victoire.

Et quand la chanson s’acheva, sa flamme s’éteignit, le laissant sous le choc agréable de la réussite.

« Woow! »

Je roulais les yeux à la question de mon jeune Padawan. J'avais oublié que contrairement à moi, Sean n'était pas vraiment du genre à rester en place, silencieux pendant environ dix minutes. M'installant sur la poutre la plus proche, je poussais un léger soupire avant de me préparer à lui répondre se qui semblait totalement inutile. Le blondinet avait de toute évidence trouver la réponse toute seule, ce qui n'était pas plus mal d'ailleurs. Je restais silencieuse et immobile en jetant de temps à autre un rapide coup d'oeil à la flamme de mon élève qui restait stable. Je ne savais pas si je devais le féliciter ou bien attendre la fin de l'exercice pour cela. Après tout, j'avais été bien trop vite pour le féliciter quelques minutes plus tôt et je ne voulais pas refaire la même erreur. En parlant d'erreur, je n'aurais peut-être pas dû lui faire part d'une technique relativement utile et qui semblait fonctionner dans son cas. Cette technique n'était autre que l'utilisation de son art dans le but d'apaiser ses flammes. Enfin, je n'avais pas grand-chose contre la musique, je pensais juste avoir une journée relativement calme. Le plus important dans cette histoire était surtout que mon jeune Padawan avait trouvé un moyen de contrôler sa flamme et je trouvais cela suffisant pour aujourd'hui.

Je laissais faire Sean comme il le voulait, du moment que sa flamme ne devenait pas incontrôlable comme cela avait été le cas quelques minutes auparavant. J'esquissais un bref sourire tout en fixant mon élève maîtriser sa création tout comme je pouvais le faire avec la mienne. On n'était pas encore rendu au moment où il maîtriserait son élément avec facilité comme moi, mais on devait avancer à un pas à la fois ce qui était suffisant. Hélas, se serait sans doute assez long, mais j'avais absolument tout mon temps. Je ne comptais pas tomber en poussière demain après tout. Je reportais finalement mon attention sur Sean dont la flamme suivait le rythme de sa musique. J'étais quelque peu amusée par la situation et un nouveau faible sourire m'échappa. Et voilà que cela me reprenait ! Je n'étais pas du genre à sourire, même faiblement avec autant d'honnêteté. D'ordinaire, mes sourires étaient tellement faux ou bien encore amusés lorsque j'embêtais l'une de mes victimes favoris. C'était d'ailleurs souvent le cas lorsque je faisais face à ma petite chasseuse préféré ou alors lorsque je lançais un nombre incalculable de piques.

La mélodie de mon élève s'estompait peu à peu tendis que sa flamme suivait le mouvement. Un léger sourire fier prit place sur mon visage pendant quelques instants avant que je prenne finalement la parole. « C'était bien, très bien. » Commençais-je en toute tranquillité et ce sans montrer ma fierté pour mon Padawan au son de ma voix. « La prochaine fois, on essaiera sans la musique même si je n'ai rien contre. » Terminais-je en toute honnêteté, sans plus tendis que mon petit Fire fit irruption dans le gymnase pour venir s'installer sur mes genoux. Je passais délicatement ma main sur le dos de mon animal. « On va enchaîner alors. » Prononçais-je en éteignant ma flamme. Je restais un instant pensive. « Quelles sont tes lacunes? » Demandais-je curieuse en pensant utiliser cela pour continuer notre cours.

Pas peu fier de sa réussite, Sean gratta encore un peu les cordes de sa guitare tout à fait gratuitement, les notes s’assemblant pour former un hymne victorieux. Car pour lui qui avait passé toutes ses années à chercher le saint remède, il s’agissait là d’une grande victoire bien que ce qu’il venait de faire pouvait être considéré comme insignifiant – dans l’optique où la magie fait partie de votre quotidien, évidemment.
La suite ne plut pas autant au blond. Dix minutes à gérer une flamme sans musique? Ce serait les dix minutes les plus longues et les plus emmerdantes de sa vie! Ne rien faire était l’une de ces choses abstraites qui étaient particulièrement méconnues de l’irlandais. À chaque heure du jour, il avait quelque chose à faire, souvent jugée ingrate ou ridicule ou même les deux, mais il occupait constamment ses dix doigts à quelque chose, n’importe quoi. Sûrement ce pourquoi les tentatives de séances de médiations avec Marlene s’étaient toujours transformées en concert de soupirs, de bâillements et surtout d’incapacité à demeurer immobile plus de quatre secondes.  

Enchainer sur les lacunes était en soi une bonne idée. Une excellente idée même. Sauf si on considérait que pour Sean tout ce qui concernait son feu était une lacune. La seule chose qu’il savait faire avec brio concernant son don était de laisser le contrôle au feu lui-même. Ça, il excellait! Le reste… on n’était pas rendu!

Les bras appuyés sur sa guitare qu’il n’avait pas renvoyée pendre dans son dos, Sean réfléchissait sérieusement à la question. Si une foule de réponses aurait dû venir, pas une ne franchit la barrière de ses lèvres.
Ses yeux verts continuèrent de miroiter la réflexion intense pendant plusieurs secondes, se promenant au plafond comme si tout le savoir du monde y était détenu.
Et ce qu’il trouva à dire à Symphonia après tout ça?

« Je suis incapable de toucher le bout de mon nez avec ma langue. »

…
M’oui, bon, en réalité, que le premier surpris s’estomac sans plus attendre car ce genre de réponses n’est pas étonnante venant de Sean… hélas.

Mon premier exercice pour mon jeune élève prenait doucement fin en musique. C'était une réussite, une petite victoire pour mon Padawan sur l'élément que nous maîtrisions tous deux. Je m'étais d'ailleurs surprise à vouloir prendre Sean comme élève. J'étais loin d'être du genre sociable depuis déjà bien longtemps et bien loin d'être une enseignante exemplaire. J'étais comme cela et je le vivais bien. Chieuse et fière de l'être. Le pire dans tout cela restait tout de même mon élève, mon opposé. Il transpirait la joie de vivre, la naïveté de la bonne humeur à pleins nez. Je me demandais même comme on faisait pour se supporter ainsi. Cela relevait du miracle et en devenait presque ennuyeux. Je n'arrivais pas à le faire sortir de ses gonds aussi facilement que ma petite chasseuse.

Je félicitais mon Padawan avec un brin de fierté dans la voix tendis que mon petit Fire s'installait confortablement sur mes genoux. Il représentait le seul être que je n'avais jamais eu envie de cramer, celui avec qui je me montrais étonnement gentille. Et oui, comme quoi je n'étais pas un total monstre. Bon, j'aurais aimé que ce soit un animal plus familier avec mon élément, mais je ne pouvais pas tout avoir de toute évidence. Je passais délicatement ma main sur son dos, lui arrachant ainsi quelques ronronnements avant d'enchaîner la leçon de Sean. Je lui lançais une interrogation dans le but de diriger mon cours dans la bonne direction. Hélas, le blond resta fidèle à lui-même et en profita pour faire une plaisanterie. « Ah ah... Ah ah... » Fis-je sans pour autant être amusé par cette réplique. D'ailleurs, il était facile de voir cela à travers mon rire qui n'en était pas un et mon visage. Cela dit, Sean me connaissait, il en fallait bien plus pour me faire vraiment rire. Enfin, si cela était possible.

Je m'attardais guère sur cette réflexion, bien que me laissant quelque peu prendre au jeu. « Tu as déjà essayé? » Demandais-je sans expression avant d'esquisser un sourire tout aussi faux que les précédents. Et cette plaisanterie close, je repris mon petit cours. Je soupirais brièvement tendis que neuf autres petites flammes prirent place à mes côtés rejoignant ainsi la première qui flottait non-loin de moi depuis le début du cours. « Un peu plus compliqué. » Commençais-je avant de rester quelque peu pensive. Est-ce que cela l'était juste un peu? Ou bien plus? Enfin, c'était un exercice comme les autres pour moi. « Tu vas essayer de suivre le mouvement et d'en faire autant que moi. » Enchaînais-je en lui faisant signe de commencer. « Prends ton temps. » Me sentis-je obligée d'ajouter pour éviter toute panique.

« Évidemment que j’ai essayé. »

Et il le disait avec tout le sérieux du monde? Ça ne pouvait être autrement. Pour le Sean des plaines irlandaises, savoir se toucher le bout du nez avec la langue était une qualité avec laquelle il aurait fait des prodiges s’il avait pu.
… M’oui bon, peut-être pas des prodiges, mais à tout le moins il aurait pu s’amuser un peu avec ce talent spécial qui n’était pas possédé de tous.
Ce disant, il essaya d’ailleurs une fois de plus, n’arrivant à rien d’autre que répandre un peu de salive sur sa lèvre supérieure. Nop, il ne s’était pas retrouvé soudainement gratifié de ce don durant la nuit, hélas.
Avec une déception non-feinte qui donnait à croire qu’il aurait vraiment aimé pouvoir arriver à un tel accomplissement, il se passa la manche de sa veste sur la bouche avant d’observer attentivement la suite – plus sérieuse cette fois-ci – du cours.

Contrôler une flamme avait déjà été un miracle, pourrait-il arriver au même résultat en multipliant la complexité du processus par neuf? Il en doutait et son visage soudainement plus blême partageait cette pensée à son mentor sans qu’un seul mot n’ait besoin d’être prononcé.

« Un peu? »

Il n’était pas certain que c’était le terme applicable ici. Souvenons-nous que, normalement, un éternuement de sa part pouvait déclencher un feu de forêt digne de dépasser les records. Son feu était tenace, têtu et ne se pliait à aucune règle préétablie… un peu comme lui si creuser la question aurait été son genre. Sean était un électron-libre qui pouvait se montrer fort buté s’il le désirait vraiment – malheureusement la motivation à l’être se portait plus souvent qu’autrement sur des éléments sans grande importance, comme se toucher le bout du nez avec la langue par exemple!

« Il est pare-feu ton gym? »

Sarcasme mit à part, le bonhomme s’appliqua tout de même. Il était ici pour apprendre, non? Et les enseignements de Symphonia étaient payants… du moins jusqu’à maintenant.
Alors il rejeta sa guitare dans son dos et se frotta les mains. La pensée régissait son don, mais il avait toujours été plus facile pour lui de prolonger l’idée à l’aide de gestes. Ça devait probablement aider son esprit à ne pas s’éparpiller comme il en avait l’habitude en d’autres circonstances!
Néanmoins, plutôt que de claquer des doigts comme pour imiter la friction d’un briquet, cette fois-ci son goût créatif alla plutôt du côté de la boulette. Frottant ses mains l’une contre l’autre, le blond donna l’impression de rouler une petite boule de papier entre ses paumes. Au moment de relâcher ladite boule, ce fut une petite boulette de feu qui s’éloigna doucement, flottant dans l’air.
Qu’il ait pu répéter une fois son exploit de contrôle dressa un air ravi sur sa figure joviale, mais celui-ci s’étira davantage à la seconde boulette de feu qui alla rejoindre la première pour la suivre à la queue-leu-leu.
La troisième posa problème cependant. Plutôt que d’aller s’enchainer aux deux autres bien sagement, elle entra plutôt en collision avec la seconde, faisant croitre la boule qui entra à son tour en collision avec la première. Les choses étaient encore relativement sous contrôle. Une boule maintenant trois fois plus grosse qu’à l’origine demeurait flottante. Il avait un peu raté son coup, mais il n’avait pas encore mis le feu partout, c’était déjà ça.

« Eh merde! »

Je poussais un léger soupire désespéré par la réaction de Sean. Je me demandais bien pourquoi j'avais enchaîné sur cette petite plaisanterie. Je pensais que mon interrogation clôturait avec perfection, mais ce fut loin d'être le cas. Cela avait permis à mon jeune élève d'enchaîner sur un bel exemple de sa capacité ou plutôt son incapacité à toucher le bout de son nez avec sa langue. Cette attitude quelque peu enfantine m'amusait quelque peu, mais je ne voulais aucunement poursuive cette dernière en enchaînant. Je me contentais ainsi de rester silencieuse en espérant que cela suffise pour que la petite plaisanterie totalement inutile pour le cours se terminerait avec ce petit test.

J'enchaînais vivement sur la suite de mon cours que je décrivais comme étant un peu plus difficile même si ce n'était pas vraiment exacte. Il en était peut-être ainsi pour moi, mais j'en doutais fortement pour mon cher Padawan. Malgré tout, cela m'aiderait à pouvoir mettre un niveau plus précis pour Sean, ce qui n'était pas d'une grande facilitée avec son attitude quelque peu désinvolte. Je commençais par montrer l'exemple à mon élève en créant neuf autres petites flammes pour accompagner celle qui se tenait à mes côtés depuis l'arrivée du blondinet. J'affichais un faible sourire amusé à la remarque de mon Padawan. « Ce n'est peut-être pas le bon terme vu ton niveau. » Avouais-je en toute honnêteté, bien obliger de mettre en avant l'aspect véridique des paroles de Sean. Blague mis à part, j'indiquais à Sean qu'il pouvait commencer lorsqu'il le souhaitait, mais surtout qu'il pouvait prendre son temps. Je n'avais pas la moindre envie qu'il flambe mon mobilier et encore moins qu'il me prépare à chat griller pour le dessert. Bon, je doutais fortement que les choses dérapent à ce point, mais on ne sait jamais. Je devais me tenir prête à toute éventualité et me concentrer autant sur mes propres créations que sur ceux de mon élève.

Je laissais Fire descendre habilement de mes genoux et sortir en toute tranquillité de la pièce. Je reportais ensuite toute mon attention sur mon élève qui avait doucement commencé à créer des petites flammes. « Pas vraiment, alors, j'ai attention. » Terminais-je par lui répondre tendis qu'une deuxième flamme apparu en douceur. Je fixais mon élève, attentive et peut-être un peu trop optimiste concernant les capacités de ce dernier. Je restais silencieuse et quelque peu décontractée jusqu'à ce que la troisième flamme se mêle aux deux précédentes. Je retenais étrangement mon soupire habituel pour laisser place à une légère surprise. Me redressant sur ma poutre, je faisais naviguer mon regard entre Sean et la flamme, je pris une expression un peu plus sérieuse. « On reste calme et on reprend le contrôle. » Commençais-je sur un ton relativement calme. « Essaye d'utiliser la musique en dernier recours uniquement. » Demandais-je tout aussi calme. Après tout, il serait pas mal qu'il commence à se maîtriser sans musique le plus rapidement possible.

Calme? Pour le moment la personne des deux qui semblait le plus paniquer, c’était plutôt Symphonia. Avec raison, dans un sens, puisque si les choses tournaient mal, c’était sa maison qui y passait, pas celle de Sean.
Le blond avait une certaine tendance à la panique, d’ordinaire, lorsque son feu lui jouait de vilains tours comme celui-ci, mais, curieusement, pas cette fois-ci. Au contraire, cet élément perturbateur fut accueilli sans stress, issu d’une assurance nouvellement acquise. Le feu ne s’était pas répandu, il s’était juste… coagulé? Peu importe le terme exact, tant qu’il n’y aurait pas le feu au plancher ou aux rideaux, l’irlandais jugeait encore les choses sous contrôle. Son hey merde était plus de la déception face à l’échec que de la panique.

Faisant quelques pas, il se rapprocha suffisamment de sa grosse boule de feu pour sentir sa chaleur lui dorer le visage. Mains sur les hanches, il observa le résultat de sa mésaventure, la tête penchée sur le côté comme si cela l’aiderait à mieux réfléchir. Comment faire pour séparer cette boule en trois?

« Huh, c’est embêtant » marmonna-t-il, réfléchissant tout haut.

Il se gratta le sommet du crâne, hébété. Il avait plus de contrôle aujourd’hui, était-il possible qu’il puisse… il le saurait tout de suite, non?
Lentement, un peu incertain quant au résultat, il tendit la main, la rapprochant toujours plus de la boule de feu qui crépitait dans le vide. Il sentait la chaleur qui en émanait, mais elle n’était pas désagréable, ses terminaisons nerveuses ne se révulsaient pas à l’idée de s’approcher davantage, son instinct n’hurlait pas qu’il allait se brûler. Alors pourquoi pas?
Il se frotta les doigts les uns contre les autres à quelques centimètres de l’impact, prit une petite inspiration discrète visant à se concentrer au mieux, puis il plongea la main dans la boule.
C’était chaud, enveloppant, agréable comme le cocon d’une couette de lit au matin. Il sourit, laissant même échapper un rire enchanté. C’était la chose la plus incroyable qu’il n’avait jamais faite!
Ressortant la main des flammes sans la moindre trace de brûlure sur sa peau, il en prit ensuite une poignée pour reformer une première boule, puis une deuxième et la troisième se tint cette fois-ci tranquille.

« Alors ça, c’est géant! »

Longtemps, il n’avait pas compris en quoi détenir ce genre de magie pouvait être envié. Pour lui, c’était synonyme de calvaire, plus souvent qu’autrement, mais aujourd’hui, il comprenait.

Le cours continuait en toute tranquillité tendis que je me retrouvais chaque minute un peu plus étonnée par les progrès de mon jeune Padawan. Bon, ce n'était pas parfait, mais l'apprentissage de mon élément demandait du temps, de la patience et du sérieux. Hélas, je n'avais pas eu la chance de tomber sur le meilleur dans ce dernier domaine. J'avais même l'impression que Sean était plutôt l'opposé. Plutôt tête en l'air et rêveur, je me demandais d'ailleurs ce que j'attendais pour le réduire en cendre. Réveillait-il réellement une partie de mon humanité refoulée ? Une question intérieure qui restera sans doute pas mal de temps en suspend. De plus, ce n'était pas le plus important à ce moment précis.

J'enchaînais les exercices le plus compliqués les un après les autres tout en jouant légèrement avec Fire qui quémandait mon attention. Son besoin aussitôt comblé, il sortit du gymnase en toute tranquillité tendis que je portais une grande attention aux gestes de mon élève. Dans un premier temps, je constatais que le jeune blond maîtrisait convenablement ses créations. Malgré tout, je n préférais pas crier victoire trop tôt. Je devais me préparer à toutes éventualités avec un élément aussi imprévisible. J'avais eu raison et son interrogation sur la résistance de mon gymnase aurait dû me mettre la puce à l'oreille. Je voyais Sean perdre légèrement le contrôle de ses flammes. M'attendant à une vague de panique chez mon élève, je lui déclarais de rester calme. Je fus d'ailleurs rassurée de constater que mes conseils n'étaient pas vraiment utiles. Mon Padawan n'était pas paniqué, loin de là. Il semblait étrangement fasciner par la flamme qui venait de prendre forme.

Me replongeant dans un certain mutisme, je regardais attentive la réaction du blondinet. Ce dernier offrait un spectacle relativement amusant d'une personne en pleine réflexion. Et dire que je pensais qu'il improvisait au fur et à mesure que le temps passait . « Tu m'étonneras toujours mon cher Padawan. » Lançais-je avec un faible sourire amusé.

Si Sean n’était pas aussi certain que sa chance finirait par l’abandonner, il se plairait bien à poursuivre ce jeu encore longtemps. Ça avait quelque chose d’électrisant de créer et manipuler ses flammes comme bon lui semblait. D’en être le maître véritable – pour changer de d’habitude! C’était relativement le même plaisir que de jouer une chanson de son invention, sauf que c’était encore mieux! La musique était un grand amour, le feu, lui, était une partie de l’irlandais au même titre que sa tignasse décolorée toujours en bataille. Après plus de vingt ans, il avait finalement eu le dessus sur cette part indomptable de lui-même. C’était grisant. Il se sentait… complet. Les morceaux de son propre puzzle étaient tous à leur place, tout à coup il exploitait ses capacités plutôt que de les enfouir au fond de lui en espérant éviter ainsi la catastrophe.
C’était un phénomène un peu curieux, c’était comme s’il était en train de se découvrir lui-même.

Devant ses boules incandescentes qui flottaient à un peu plus d’un mètre du sol, blondie avait un sourire doux sur le visage. Sourire qui s’élargit encore un peu au commentaire de son mentor. On ne le félicitait pas souvent pour ses exploits académiques, on pourrait même presque dire que c’était la première fois si on ne comptait pas les cours de musique ou de sport au lycée.
Pris d’une envie subite, ayant déjà oublié le commandement initial où normalement il lui restait encore des flammes à créer, l’irlandais s’amusa à disposer ses boules l’une par-dessus l’autre. À celle du milieu, il créa un filament de chaque côté en ayant pincé les bouts.
Ce n’était pas un bonhomme de neige très conventionnel, mais dans cette région où on pouvait se balader en bermudas même l’hiver, c’était pas mal le seul que pouvait s’offrir Sean.
Un rire d’enfant s’échappa de sa bouche devant le résultat ressemblant mais franchement bizarre que ça donnait.

Pour sa défense, nous dirons que le mauvais élève qu’il était n’était pas si désespérant que ça. Il y a tout juste une heure, il n’aurait jamais cru être capable de faire une telle chose. Lui qui, hier encore, avait mis le feu à un banc de parc parce que l’explosion d’un pot d’échappement l’avait fait sursauter!

J'avais sans doute réagi trop vite, m'attendant au pire de la part de mon élève. Je pensais qu'il réagirait de façon excessive face à la tournure que prenait les événements. Il avait légèrement perdue le contrôle et je ne savais pas pourquoi, mais j'étais persuadée qu'il réagirait comme il l'avait fait peu de temps auparavant... Et bien, non j'avais tort. Il le prenait étrangement bien, reprenant à son rythme le contrôle de ses créations. Il semblait particulièrement fasciner par ces dernières et jouait avec elle. Je le regardais, impassible. Je me demandais comment tout cela allait se terminer, mais j'étais également quelque peu rassuré de voir qu'il n'avait enfin plus peur de son élément. Un sentiment que j'avais souvent vu en lui lorsqu'il perdait le contrôle de ses flammes, mais là c'était différent.

Je n'y portais guère plus d'attention, me contentant d'être attentive à ce qu'il découvrait peu à peu, mais aussi à ce qu'il faisait de ses flammes. Je m'amusais quelque peu du spectacle relativement qu'il m'offrait. J'avais bien du mal à voir ce cher Sean en grand penseur avec une mine des plus sérieuses. J'avais toujours pensé qu'il improvisait sans cesse au fur et à mesure, ne s'attardant jamais sur ce qui aurait pu se passer. Et pour le coup, je ne savais pas vraiment si je devais réellement douter de cette théorie. Il semblait réfléchir, mais comment pouvait-il le faire? Sérieusement, le blondinet était une véritable énigme à lui tout seul. Je n'arrivais jamais à le comprendre et c'était sans doute mieux ainsi.

Hélas, il resta fidèle à lui-même, un véritable enfant dans un corps d'adulte. Je roulais les yeux quelque peu désespéré, mais je ne fis aucune réflexion. Je n'avais pas à dire grand-chose, car bien que ce n'était pas le but de l'exercice, il me montrait d'une certaine manière qu'il pouvait contrôler son élément. « Pourquoi un bonhomme de neige? » Demandais-je sans plus de curiosité tandis que Sean éclata de rire comme un enfant de cinq ans. Je n'étais pas spécialement curieuse, mais étant une personne qui déteste la neige, je me devais de demander qu'elle pouvait être l'intérêt de cette chose blanche et glacée.

Pourquoi un bonhomme de neige?
C’était une excellente question. Ou la pire à poser à un blond d’Irlande! Sean et ses faits et gestes n’étaient pas ce qui… s’expliquait… le plus facilement. Lui-même, à la question, pourtant toute bête, de son mentor, s’arrêta pour observer sa création, donnant l’impression de la regarder d’un œil nouveau.
Pourquoi un bonhomme de neige?
Au final, le fier représentant de la Guinness haussa les épaules, de cette attitude débonnaire qui le caractérisait tout spécialement.

« J’sais pas. Parce que c’est drôle? »

Un bonhomme de neige fait de flammes, il y avait de quoi être aux antipodes ici. Mais Sean avait toujours adoré l’eau et la neige. Le froid le tempérait, d’une certaine manière, l’eau sauvait de ses catastrophes inopinées. Et puis, il y avait le surf! Son deuxième amour, tout de suite après sa guitare et la musique.
Ce devait sûrement être contre nature, un homme vivant de flammes, s’adonnant aux loisirs hivernaux et aquatiques avec tant de plaisir, mais que voulez-vous, on ne pouvait espérer Sean autrement que dans la plus complète des contradictions!
Mais à quoi bon chercher des réponses à ces pourquoi? Sean aimait le surf et la nage et la navigation et la planche à neige. Il y avait quelque chose de magique à se promener sous une petite averse de neige toute douce. Le blanc couvrait la saleté noire et calcinée pour rendre tout immaculé.
Sean était… dangereux, principalement parce qu’il avait du mal à contrôler son don, et cet élément ennemi du sien était en vérité son meilleur ami parce qu’il l’empêchait de dépasser les bornes.

D’un sourire, il balaya sa création d’un revers de main, le bonhomme de flammes s’évaporant en fumée, l’air s’emplissant de la commune odeur de soufre comme lorsqu’on souffle une chandelle.

« Est-ce que c’est tout pour aujourd’hui? »

Il ne le disait pas comme ça, mais mine de rien, ça lui avait soufflé son énergie de contrôler autant son don en une seule séance. Et il faut dire qu’il avait un peu peur de se laisser gagner par l’enthousiasme et ça, ce n’était pas bon. Normalement, son feu devenait encore plus intense et imprévisible dans ces cas-là. La joie, la colère, les émotions fortes avaient l’effet de jeter de l’huile sur son feu pour le transformer en brasier incontrôlable.
Il s’était bien débrouillé jusqu’à maintenant, il n’avait pas forcément envie de terminer tout ça sur une énième catastrophe.

La réponse de mon jeune élève ne me surprenait guère. Ce fut une réponse simple surmonter d'une question à laquelle je ne pourrais jamais donner la réponse voulue par mon Padawan. Sa création en forme de bonhomme de neige semblait l'amuser et cette fameuse question prouva son attitude. Hélas pour lui, je n'y voyais absolument rien de drôle. En même temps, je ne pouvais pas dire que j'avais l'humour facile, non c'était loin d'être le cas. On aurait même pu que je ne pensais jamais au vu du comportement particulièrement enfantin de Sean. C'était ce qui me différenciait des autres, en plus de mon caractère de merde et du fait que j'étais une démon plutôt solitaire. J'aimais vivre ainsi, seule sans la moindre raison de me montrer humaine à nouveau. Je n'en avais pas la moindre envie après tout, alors à quoi bon forcer. Un démon immortelle n'avait aucunement besoin de s'attacher pour ne laisser derrière que le goût amer d'une trahison par ceux avec qui il avait pu s'attacher. J'étais dans cette situation et mon siècle d'expérience m'avait appris à me montrer méfiante face aux humains à tous ceux qui étaient capables de trahison. Tout le monde en gros. Il m'arrivait d'ailleurs de me demander pourquoi j'avais ainsi pris le blondinet sous mon aile. Je n'avais rien d'une professeur ou bien d'un maître yoda et il était du genre exubérant. Peut-être un élan d'humanité qui se baladait la première fois que je l'ai croisé.

Sean m'extirpait finalement de mes pensées plusieurs minutes plus tard par une nouvelle interrogation. Celle-ci cependant était dans mes cordes. Le cours était-il terminé? Ma foi, je ne pensais qu'il était judicieux de continuer. Mon jeune Padawan avait pas mal travaillé et je me doutais qu'il devait se vider plus facilement de son énergie. Je fis disparaître une à une les flammes qui tournaient autour de moi depuis le début de l'exercice avant de me lever en souplesse et de faire face au blondinet. « Je pense qu'on va en finir là. » Commençais-je tranquillement en me dirigeant vers la sortie de mon gymnase. « Tu as bien travaillé. » Ajoutais-je en le saluant brièvement tout en le raccompagnant jusqu'à la porte d'entrée.

Voilà, le cours était terminé. Sans plus attendre, je m'élançais dans ma demeure pour commencer de nouvelles activités.